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26 janvier 2012 4 26 /01 /janvier /2012 07:57

« on ne meurt jamais pour rien lorsque l’on vous respecte comme un héros au lieu de vous plaindre comme une victime »

 

 

 

 

Quand se retirer d'Afghanistan?

Propos recueillis par Romain Rosso, publié le 25/01/2012 à 17:34, mis à jour à 17:38

 

L'Otan a fixé à 2014 le retrait des forces occidentales. Le meurtre de quatre soldats français doit-il amener Paris à accélérer le retour de ses troupes? Guy Teissier (UMP) et Jean-Yves Le Drian (PS) expriment des avis divergents. Et rendent hommage aux militaires. 

 

Guy Tessier député-maire UMP des Bouches-du-Rhône, préside la commission de la Défense nationale et des Forces armées de l'Assemblée nationale depuis dix ans ans et Jean Yves Le Drian, président du conseil régional de Bretagne et porte-parole de François Hollande sur les questions de défense.

 

Avec 82 morts en Afghanistan, faut-il accélérer le retour des forces françaises?

Jean-Yves Le Drian: Nous avons accompli notre devoir en Afghanistan. Après les attentats du 11 septembre 2001, la France devait se montrer solidaire des Etats-Unis, dans l'esprit de l'article 5 du traité de l'Atlantique Nord. Les valeurs de la démocratie étaient également en jeu.  

Dix ans plus tard, on ne peut plus dire que l'Afghanistan soit le sanctuaire "confortable" d'Al-Qaeda. Nous sommes passés d'une action militaire contre le terrorisme à un conflit de type contre-insurrectionnel, avec des phénomènes de guerre civile. Si le but consistait à réduire les risques terroristes sur notre territoire et sur celui de nos alliés, la mission a été accomplie, pour l'essentiel.

Depuis des mois, nous constatons une stratégie brouillonne de Nicolas Sarkozy, avec des objectifs politiques et militaires imprécis. S'il est élu président de la République, François Hollande affichera, lors du sommet de l'Otan à Chicago (Etats-Unis), en mai prochain, la volonté forte d'un retrait définitif et global d'ici à la fin de 2012. Cela sera conduit en coopération avec nos alliés et les autorités afghanes.

 

Guy Teissier: A la suite de l'assassinat de quatre de nos soldats, le président de la République a annoncé une suspension des opérations de formation au profit de l'Armée nationale afghane (ANA) et un éventuel retrait anticipé si les conditions de sécurité n'étaient plus assurées. Ce sujet doit faire l'objet de discussions avec le président afghan, Hamid Karzai, lors de sa visite à Paris, le 27 janvier. Gardons notre sang-froid.

Je voudrais rappeler le sens de la mission. Nous nous sommes engagés, en 2001, dans le but d'extirper du pays le venin du terrorisme. Pour avoir la garantie de la sécurité chez nous, il fallait commencer par lutter à des milliers de kilomètres. Au fil du temps, la France et ses alliés se sont appuyés sur un triptyque: sécurité, gouvernance et développement. Dans les secteurs qui nous ont été assignés (Kaboul et Surobi), nous avons réussi, puisque nous avons transféré la responsabilité de la sécurité aux forces afghanes.  

En Kapisa, les opérations sont menées par l'armée afghane, les Français intervenant désormais en appui. Ces succès permettent de nous retirer progressivement, mais l'effort de formation et de soutien à l'ANA n'est pas achevé. François Hollande ne peut pas balayer d'un revers de la main cette réalité. Ses déclarations témoignent de sa fébrilité et relèvent de la posture le temps de la campagne.

 

Comment poursuivre notre collaboration avec une armée afghane peu fiable?

Guy Teissier: Je n'utiliserais pas ce qualificatif. Les relations entre l'armée française et l'ANA sont excellentes, et la coopération sur le terrain est tangible. Des actions isolées de talibans infiltrés ne doivent pas hypothéquer cette situation. Au contraire, le maintien de ces liens et leur approfondissement sont nécessaires parce qu'ils conditionnent le succès de la transition prévue à partir de 2014. Cela serait d'autant plus vrai s'il venait à se confirmer une accélération du calendrier du retrait de nos forces. Sinon, à quoi auraient servi dix années de présence et le sacrifice de 82 soldats?

 

Jean-Yves Le Drian: Dans la période précédant le retrait, nous veillerons à obtenir toutes les garanties de sécurité pour les hommes et les femmes déployés dans le cadre de cette mission difficile. Ces tragiques événements le prouvent: face aux formes d'insurrection qui ne sont pas éradiquées, loin de là, il faut constater que la solution militaire n'est pas la solution de sortie. Les talibans ne sont pas comparables à Al-Qaeda, malgré certains points de jonction. Ils ne poursuivent pas le même objectif.

L'issue, aujourd'hui, est de nature politique. La France doit en tirer les conclusions pour sa politique étrangère et de défense. Lorsqu'il était candidat, Nicolas Sarkozy lui-même déclarait que la France n'avait pas "vocation à rester éternellement en Afghanistan", mais, une fois élu, il s'est montré suiviste et sans influence sur la stratégie décidée par Washington. 

 

Guy Teissier: Je rappelle que la France agit dans le cadre d'une coalition. Tout retrait doit être concerté avec nos alliés: nous n'avons pas le choix. Lors de sa rencontre à Paris avec Hamid Karzai, Nicolas Sarkozy doit signer un traité d'amitié franco-afghan pour une période allant, dans un premier temps, de 2012 à 2016.

La mission sera terminée lorsque l'on aura la certitude d'un développement économique accompli. Ce n'est pas encore le cas, au regard de l'insécurité et de la corruption qui règnent dans le pays. Pour que les millions d'euros que nous engageons soient bien utilisés, il faut continuer à aider l'Afghanistan dans sa gouvernance et dans la formation de ses élites.

 

Jean-Yves le Drian: L'Afghanistan est un pays avec lequel la France entretient des relations étroites et anciennes. Celles-ci se poursuivront au profit d'un peuple trop longtemps asservi et martyrisé. Nous sommes préoccupés par la stabilité de ce pays et de sa région, par le développement durable et harmonieux de ses territoires, par la mise en oeuvre des valeurs inscrites dans la Constitution dont il s'est doté démocratiquement. Elles ont été au coeur de notre action et des sacrifices consentis.

 

 

 

Ne faut-il pas craindre une relance de la guerre civile, une fois les militaires partis?

Guy Teissier: Le risque majeur serait que les talibans se réarment et enrôlent massivement la population. Pour l'instant, ils ne représentent qu'une minorité - certes agissante. Si les Afghans ne souhaitent plus de présence étrangère, ils ne veulent pas davantage revenir en arrière. Ils veulent vivre dans la paix.

 

Jean-Yves Le Drian: Les risques demeurent dans les deux cas. Si nous restons, l'insurrection se poursuivra contre les "forces d'occupation". Si nous partons avant que les Afghans ne soient capables d'assurer la transition, les seigneurs de guerre peuvent provoquer de nouvelles formes de guerre civile. Tout dépendra également de l'attitude des pays voisins.

Quelles leçons tirez-vous de plus de dix ans de guerre?

Guy Teissier: Depuis la fin de la guerre d'Algérie, la France avait principalement mené des opérations de maintien de la paix. Durant cette période, on a cru naïvement que l'on pouvait mener des batailles avec zéro mort. Le conflit afghan a mis en évidence ce que sont les guerres asymétriques. Notre concept stratégique a été revu. Nous avons accru le caractère précieux de la vie des hommes, qui font preuve d'un courage digne de la tradition des armées françaises. Un palier technologique a également été franchi, grâce à l'emploi des armes les plus modernes dont la France s'est dotée: canons Caesar, hélicoptères d'attaque Tigre, drones de moyenne altitude longue endurance, etc. Nos armées en bénéficient grâce à la clairvoyance du président de la République et du gouvernement.

 

Jean-Yves Le Drian: Je partage la même fierté à l'égard de nos soldats, qui ont montré une conscience impressionnante dans l'exercice de leur mission. Leur exemplarité doit être davantage mise en valeur. Il est un peu injuste que l'opinion ne le mesure pas assez. Du fait de son éloignement et de l'absence de pédagogie et de transparence du gouvernement, l'Afghanistan a pu apparaître comme une guerre oubliée. La nation doit sa reconnaissance à ceux qui y ont perdu la vie, et chacun d'entre nous doit être solidaire avec leurs familles et avec nos blessés. François Hollande y sera particulièrement attentif.  

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